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Pourquoi les managers, et particulièrement ceux du marketing, seraient-ils concernés par les droits de l'homme ? Ils sont bien évidemment exposés au risque de voir leur entreprise se retrouver un jour sous les projecteurs de l'actualité et plus particulièrement accusés d'avoir manqué au respect de ces droits dans des zones où ils exercent leur activité. Mais ce n'est pas directement cette approche qui inspire notre propos qui ne vise ni à la morale, ni à définir un cadrage éthique, ni même encore à élaborer des règles de bonne gouvernance.Il s'agit, aussi intolérable que cela puisse être, en première considération, pour certains, de nous en tenir aux domaines, aux compétences et aux métiers du marketing, en les inscrivant dans une nouvelle donne professionnelle, tant par ses évolutions propres que par les réponses puissantes que le marketing peut apporter aux modifications de l'environnement et de la gouvernance.Afin d'être clair sur le sens du raisonnement que nous présentons, commençons par l'aboutissement de notre démarche. Nous proposons d'introduire, dans les affaires et en pilotage marketing, un nouvel indicateur de « traçabilité droits de l'homme », information qui donnerait ? sous une forme de préférence qualitative, donc sans volonté d'introduire une approche quantitative continue (mesure qui serait contraire à l'esprit même des droits de l'homme) ? un bilan synthétique et précis du respect de cette notion tout au long de la chaîne de constitution marchande d'une offre de biens ou de services. En un mot, nous plaidons pour un avertissement de « la traçabilité des droits de l'homme » dans les offres de natures économiques. 1 Pourquoi une traçabilité des droits de l'homme dans les produits et services ? Les droits de l'homme constituent une sorte de pléonasme, car ils sont le droit des droits, ils différencient l'être humain du végétal et de l'animal. Tout juge est un juge des droits de l'homme, c'est d'ailleurs le cas dans certains pays. L'homme digne existe car il exprime des droits, sources de ses devoirs. Sans cette liberté, qu'est-il si ce n'est cette espérance ? Et s'il en est ainsi, comment ces droits s'expriment-ils économiquement, donc sur les marchés, en rendant justement ces derniers véritablement humains, en les sortant de leur froideur théorique dont on sait désormais à quoi elle peut mener. Les droits de l'homme ont cette caractéristique exceptionnellement puissante qu'ils n'opposent pas l'individuel au collectif. Chaque être humain doit être respecté dans toute communauté et le respect de la communauté passe par le respect individuel de chacun de ses membres, sans exception. Les droits de l'homme sont plus que compatibles avec le respect des conditions de concurrence.Pourtant, et c'est le deuxième volet du raisonnement, ces droits sont à l'évidence bafoués dans nombre de pays et territoires de la planète. Dès lors comment une entreprise qui doit exercer son activité dans une telle zone, en raison par exemple de la présence de matières premières consubstantielles à son activité, peut-elle raisonnablement demander que la population, et surtout les autorités du pays, honorent les droits de l'homme ? Y a-t-il une alternative au fait de quitter le pays non soucieux de la dignité humaine, ce qui signifierait, par exemple, quasiment la fin des grands groupes d'énergie fossile ? Ce serait relativement irresponsable bien que satisfaisant sur le plan narcissique pour les défenseurs de décisions relevant de telles extrémités et dont les effets négatifs, y compris sur les populations locales, sont rarement envisagés.De façon assez inattendue, le marketing apporte peut-être la solution à ce dilemme. En effet, si nous considérons que c'est aussi le produit (ou le service) lui-même qui est le détenteur des droits de l'homme, droits qu'il accumule ou non tout au long de son processus de création de valeur, il nous faut alors aussi examiner quel est le marché pertinent de cette expression. Le marché crucial, à cet égard, n'est pas celui du client final face à la distribution, c'est-à-dire le marché final. Plus intéressant est le lieu, le moment où, solidairement, le consommateur, le distributeur et l'entreprise respectueuse de ces droits se trouvent, par le fait de la création de valeur ajoutée, confrontés à un acteur non respectueux de ces droits.Cette approche marketing, qui pourrait sembler essentiellement théorique, ne l'est en aucun cas. Elle permet à une firme de renoncer à une offre non conforme aux droits de l'homme, non pas en raison de sa morale ou de ses propres codes éthiques, souvent impuissants devant la force de la réalité du business, mais en raison du refus de ses propres consommateurs à acquérir de tels produits. Une firme pourra ainsi refuser de s'approvisionner dans des conditions qui compromettraient sa propre capacité à écouler son offre auprès de ses consommateurs, qui désireront que la chaîne de valeur soit compatible avec le respect des droits de ceux qui y contribuent directement, et un jour sans doute indirectement (sous-traitants, autorités juridiques, etc.). Si ces consommateurs constituent l'essentiel du pouvoir d'achat planétaire, alors l'entité irrespectueuse des droits de l'homme se verra forcée de s'y conformer ou de risquer la faillite. Certes, cela prendra du temps et ne sera pas aussi radical, mais la tendance sera imprimée, et définitivement sans doute.L'avantage pour les firmes respectueuses est considérable car elles évitent ainsi l'affrontement direct, l'antagonisme moral et pourront s'en tenir aux simples lois des débouchés et du consumérisme. 2 Notre proposition consiste donc à introduire, avec prudence et rigueur, un indicateur de traçabilité droits de l'homme et de le notifier sur les offres, avec une labellisation indépendante, qui trouvera son affirmation dans le conseil d'administration de nombreuses firmes. Le consommateur est libre d'acheter ou pas, en toute information transparente et objective. Cette position, défendue par l'ambassadeur de France aux droits de l'homme, François Zimeray, recueille la faveur de dirigeants d'entreprise soumis à des pressions insupportables que leur personnel, souvent expatrié, doit subir, générant souffrances et difficultés professionnelles bien inutiles. 3 Les conséquences sont de trois ordres. En premier, elles sont relatives à la dignité humaine dans le travail. Ensuite, elles établissent un pouvoir solidaire entre les consommateurs et les firmes face à l'indignité. Ce serait très nouveau et ainsi, les marques qui poussent dans ce sens y gagneront une adhésion affective, une intimité avec le consommateur, qui nous semble bien supérieure aux effets des labellisations écologiques, si l'on admet que la dignité humaine prime sur tout bien évidemment.Enfin, elles ont un rôle pédagogique vers les pays qui voudraient cheminer vers cette amélioration sans se sentir dirigés, manipulés, par des puissances institutionnelles étrangères. Le consommateur voterait avec son argent pour les produits respectueux des droits de l'homme. Nous le savions, « le dollar est un droit de vote », sur les marchés bien sûr. Cette approche permettrait aussi de repositionner la question des délocalisations industrielles qui devraient s'effectuer certes en regard de considérations de coûts mais désormais aussi de dignité humaine.Si la valeur ajoutée trouve sa source dans l'homme et non uniquement dans la transformation de la matière, il y a alors, outre les implications philosophiques, une affirmation de la liberté et du respect dû à tout être, qu'il soit producteur ou non, fort ou invalide, sans distinction de couleur de peau ou d'ethnie, en un mot, une valeur individuellement universelle, si recherchée par les théoriciens des marchés et qui pourtant est sous nos yeux, éclatante et parfois meurtrie, et à qui le marketing peut donner un élan refondateur.Le marketing et les nouveaux pouvoirs des consommateurs peuvent aussi défendre des causes larges et belles. Les droits de l'homme sont consubstantiels au droit économique. Il serait dangereux de se précipiter sans débats dans de telles mesures, mais il serait tout aussi périlleux de trop tarder à agir, tant pour ce que ces droits représentent dans l'absolu que pour la redistribution économique intelligente et efficace qu'ils peuvent occasionner.


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