Les mercantilistes ont les premiers, du XVIe jusqu’au XVIIIe siècle, défini des concepts permettant d’expliquer la richesse des nations et recommandé, ou mis en œuvre, des mesures pour favoriser leur dynamisme économique.
Selon eux, les objectifs visés sont simples : richesse et puissance et pour ce faire, on compte trois facteurs de croissance : abondance en hommes, abondance en argent et intervention étatique.
L’Etat joue donc un rôle majeur dans la course à la richesse : c’est à lui que revient le devoir de stimuler l’activité économique et l’emploi. Il doit aider et protéger les entreprises et être centralisé pour pouvoir imposer sa politique et contrôler les échanges commerciaux. La politique mise en place au XVIIe siècle par Colbert l’illustre parfaitement : il a cherché à doter l’Etat français d’une balance commerciale excédentaire en encourageant le commerce.
Il faut se rappeler que les premiers mercantilistes ont vécu à une époque où les pays européens étaient divisés en fiefs seigneuriaux nécessitant de s’acquitter de multiples taxes et droits de passage. Ils ont alors cherché à favoriser la suppression de ces « douanes internes ». Mais pour qu’un Etat soit puissant, il faut que ses caisses soient pleines de métaux précieux. Comment les remplir ? En exportant notamment des produits manufacturés échangés contre des métaux précieux et en limitant les importations au moyen de fortes taxes.
Parallèlement, les mercantilistes préconisent des taux d’intérêt bas pour favoriser la consommation et l’activité économique intérieure. Ce type de politique est donc à double tranchant, car elle peut aussi contribuer à accentuer le déficit commercial en stimulant la demande des produits importés.
L’école physiocratique, première grande école économique, s’est développée en France au XVIIIe siècle avec pour maître à penser, François Quesnay (1694-1774). La physiocratie signifie le « gouvernement de la nature ». Les physiocrates se sont définis comme des « philosophes économistes ».
En réponse aux mercantilistes, les physiocrates affirment que l’État n’a pas à intervenir dans la sphère économique.
C’est inutile puisque l’économie est gouvernée par des lois naturelles analogues aux lois physiques. Des lois valables en tout temps et en tout lieu. Cette universalité met tout le monde sur un pied d’égalité si on respecte la « liberté du commerce » et la « liberté de l’industrie ». Il faut bannir les « servitudes seigneuriales » pour les paysans et les « servitudes gouvernementales » pour les industriels qui mettent des freins au développement économique. Il faut « laisser faire, laisser passer » et supprimer toutes les barrières douanières.
Vivant dans une société qui reste essentiellement rurale, les physiocrates estiment que seule la nature, et donc les paysans, produisent de la richesse. Les propriétaires fonciers vivent du surplus dégagé par les agriculteurs. Quant aux artisans et ouvriers, ils ne font que transformer des produits qui proviennent de la nature et forment donc une « classe stérile » !
Pour bien monter sa rupture totale avec les économistes qui l’avaient précédé, Karl Marx dans Le capital a, le premier, qualifié ces auteurs de « classiques ».
Ce sont essentiellement des économistes anglais et français du XVIIIe siècle et du XIXe siècle : Adam Smith, Thomas Malthus, David Ricardo, Jean-Baptiste Say et Frédéric Bastiat. Ils marquent une période d’intense réflexion sur le fonctionnement de l’économie, alors que se développent rapidement la société industrielle et le capitalisme moderne. Les « classiques » essayent de définir des « lois économiques universelles », valables à toutes les époques et partout.
Leurs ambitions sont similaires, mais les concepts et les théories économiques des « classiques » sont très divers. Quoi de commun entre Thomas Malthus qui estime que l’ouverture des frontières est dangereuse et David Ricardo, pour qui le développement du commerce international est source de richesses pour un pays ?
Les économistes classiques sont néanmoins, dans l’ensemble, au moins d’accord sur un point : l’intervention directe de l’État dans l’économie doit être limitée au minimum nécessaire pour garantir le bon fonctionnement du marché. En cela, on peut considérer qu’ils sont libéraux.
Les « classiques » s’interrogent tous sur l’origine et la formation des richesses. Si leurs réflexions divergent sur ce point, ils estiment cependant que l’offre et la demande tendent à s’équilibrer. Les déséquilibres ne sont que provisoires. Cet ordre naturel engendre également une division du travail. Chaque être humain a des compétences spécifiques qui lui permettent de réaliser au mieux ce qu’il doit faire dans la société comme dans une entreprise.
La théorie marxiste repose sur une analyse « matérialiste » de l’évolution de l’histoire. Ce ne sont pas les idées qui sont prédominantes, mais les conditions matérielles et l’évolution des modes de production. Autrement dit, c’est « l’infrastructure » économique, c’est-à-dire la base économique de la société qui explique son évolution et non sa « superstructure » idéologique, juridique et politique.
Les marxistes appréhendent l’économie comme une succession de modes de production : le mode féodal a laissé place au mode de production capitaliste, celui-ci sera remplacé par les modes de production socialiste et communiste.
Pour les marxistes, le capitalisme va en effet s’effondrer pour laisser place au socialisme car il repose sur une contradiction essentielle : la « baisse tendancielle du taux de profit ». Cette baisse progressive du profit s’explique ainsi : ce qui donne de la valeur à un produit, c’est, pour Marx, le travail qui a été nécessaire pour sa production. Mais les capitalistes doivent investir de plus en plus dans les moyens de production (les machines, aujourd’hui les ordinateurs, les robots…) pour faire face à la concurrence. Il faut donc de plus en plus de capital pour financer ces investissements, mais la valeur des biens produits n’augmente pas pour autant puisque cette valeur repose, selon la théorie marxiste, sur le travail uniquement. Le taux de profit baisse ainsi inévitablement.
Pour sauver leurs bénéfices, les capitalistes vont augmenter leur production et baisser les salaires ou réduire le nombre de salariés qu’ils emploient. Ainsi, le pouvoir d’achat global diminue alors que la production augmente. La surproduction est donc inévitable et se généralise à tous les secteurs d’activité.
Miné par cette contradiction fondamentale, le système capitaliste court à sa perte.
Mais pour faire « du passé table rase », il faudra une dictature du prolétariat et une appropriation collective des moyens de production. L’État gérera alors l’ensemble du système productif. Puis, stade ultime de cette évolution du système économique, l’État disparaîtra et la richesse sera redistribuée « à chacun selon ses besoins ». La société sera alors « communiste », la propriété sera commune, il n’y aura plus de classes sociales et d’ « exploitation de l’homme par l’homme ».
L’intervention de la puissance publique dans l’économie a été décisive à maintes reprises. En France, depuis Colbert, l’État a joué à plusieurs périodes un rôle moteur important dans l’économie. C’est pourtant un anglais, l’économiste John Maynard Keynes qui a théorisé l’interventionnisme public dans l’économie au lendemain de la crise de 1929.
Pendant les Trente Glorieuses, la politique économique française menée par l’État était assez dirigiste, avec notamment, le soutien public à des secteurs jugés stratégiques (aéronautique, informatique, téléphonie…) pour le pays. Depuis, le débat entre les partisans d’une implication minimum de l’État dans l’économie et les interventionnistes qui estiment qu’il doit fixer le cap du développement économique en intervenant si nécessaire est permanent.
Mais au-delà de la théorie, le pragmatisme s’impose quand c’est vraiment nécessaire. A l’exemple des États-Unis, où le Président, quelle que soit sa couleur politique, n’a jamais hésité à mettre en œuvre des mesures très keynésiennes pour relancer, notamment, le pouvoir d’achat. Seule l’efficacité compte alors. Mais en Europe, la législation communautaire encadre très précisément le champ d’intervention de l’État, ce qui limite sa marge de manœuvre.
L’analyse monétariste s’est développée à la fin des années 1960, en opposition au keynésianisme. Les monétaristes condamnent les politiques « laxistes » de l’État en matière monétaire et budgétaire. Elles n’ont à long terme aucun effet sur l’activité économique mais sont source d’inflation qui est un phénomène strictement monétaire. Les monétaristes, en particulier l’économiste américain Milton Friedman, préconisent une progression annuelle de la masse monétaire calquée sur la croissance. Le volume de la monnaie en circulation (la « masse monétaire ») doit être suffisant pour financer les transactions correspondant à l’activité économique d’un pays. Pas plus pas moins.
En France, Jacques Rueff (1896-1978), économiste et haut fonctionnaire, reprendra l’idée selon laquelle « La monnaie est le carburant qui alimente toujours l’inflation ». Qualifié de « monétariste métalliste », il estimait que le meilleur moyen de maîtriser la masse monétaire était de revenir à l’étalon-or (la valeur des monnaies est évaluée en fonction de sa valeur en or. Le métal jaune est alors l’« équivalent général ») abandonné en 1944.
Récemment, certains économistes américains d’inspiration libérale ont repris l’analyse « classique » d’Adam Smith, David Ricardo et Jean-Baptiste Say, en partant d’un nouveau postulat : avant de décider d’investir, de produire, de consommer ou d’épargner, tous les agents économiques utilisent rationnellement les informations de plus en plus nombreuses dont ils disposent.
Robert Lucas, prix Nobel d’économie en 1995, est le plus célèbre représentant de cette école. Pour lui, avant d’agir, nous anticipons l’avenir. Ces « anticipations rationnelles » sont immédiates, selon les nouveaux classiques. Inutile donc, par exemple, de tenter de relancer la consommation en baissant les taux d’intérêts ou en augmentant la masse monétaire. Les banques vont anticiper une reprise de l’inflation et remonter les taux de prêts aux consommateurs. Cette course à l’échalote rend donc vaine les politiques économiques puisque les acteurs anticipent ses conséquences négatives.